Il est possible de serrer la vis

En cette période de fin d’année, les élèves et leurs parents prêtent une attention particulière aux appréciations des enseignants sur les bulletins. Une appréciation est courante, quand les chargés de cours s’aperçoivent qu’un élève n’exploite pas assez ses capacités : peut mieux faire. Si l’on devait se prononcer sur les récentes mesures gouvernementales destinées à réduire le train de vie de l’Etat hyper dépensier qu’est le Gabon, on dirait qu’il est possible de serrer la vis, tellement il y a encore de postes dans lesquels on peut faire des coupes claires, à défaut de les supprimer carrément.

De ce fait, les Gabonais sont fondés à s’attendre à ce que les prochains Conseil des ministres définissent aussi les classes des hôtels dans lesquels les membres du gouvernement et les cadres de l’administration publique seront autorisés à loger lors des missions à l’étranger. En effet, des rapports confidentiels révèlent que les rentiers qui composent la classe dirigeante ont une propension irrépressible à parader dans les palaces. A ce sujet, le gouvernement est appelé à faire toute la lumière sur l’hôtel parisien Pozzo di Borgo, acheté en 2010 à 65 milliards de FCFA pour réduire les dépenses publiques liées au séjour des commis de l’Etat dans la capitale française. Ambition noble, mais qui aurait tourné en une entourloupette, dans la mesure où ce bien serait devenu au finish la propriété privée d’un ponte du régime déchu. Il ne serait pas inutile de déterminer également le type de voitures à louer à l’étranger. Sur le territoire national, le gouvernement, qui a proclamé son objectif de parvenir à une gouvernance empreinte sobriété, devrait donc regarder à la nature et au nombre des moyens de locomotion des ministres et des cadres de l’administration. S’il est tout à fait normal que pour le confort minimal, la sécurité et le prestige de la fonction, les membres du gouvernement disposent d’une voiture adéquate, faut-il que ce soit le genre qui fait saigner le Trésor public ? On s’interroge aussi sur la taille du parking d’un ministre et du directeur général (DG) d’une administration publique.

Tout comme l’opinion publique est en droit de se demander pourquoi un DG dont l’activité se limite à Libreville et ses environs doit rouler dans une grosse cylindrée. Et ils sont nombreux dans ce cas. Une telle dépense peut se comprendre pour les gouverneurs, par exemple, qui doivent se rendre dans les recoins du pays sur des routes en piteux état. Que cela soit dit sans fioritures : le parc automobile de l’Etat est un gouffre à sous. Si l’exécutif veut réellement réaliser des économies sur ce poste, il gagnerait à s’inspirer de ce que le patriote Thomas Sankara fit au Burkina Faso, c’est-à-dire équiper les administratifs de montures correspondant strictement aux besoins de leurs tâches. Les économies engrangées servirent à l’amélioration des conditions de vie des citoyens. Il est plus que jamais temps, en effet, que l’argent public serve au bien-être de tout le monde et non plus à entretenir une caste de privilégiés dont le rendement est sujet à caution. Au moment où les agences dégradent la note du Gabon, ce n’est pas à la piétaille qu’il sera encore demandé de se serrer la ceinture, alors que les couleuvres qui vivent aux crochets du pays seront à l’abri des cures d’amaigrissement.

Il sera difficile de trouver un Gabonais en pleine possession de ses moyens opposé à l’objectif gouvernemental d’un « Etat sobre » tel que préconisé lors du Conseil des ministres du 20 juin 2025. Pour autant, le travail semble inachevé en ce qui concerne la réduction de la taille des cabinets. Alors que lui-même est cantonné dans les tâches que son chef veut bien lui concéder, le vice-président de la République est autorisé à s’entourer d’un nombre indéterminé de chargés de missions, en plus de conseillers et de conseillers spéciaux, eux aussi au nombre non indiqué. Il faut déjà remarquer que le cabinet du président de la République a les allures des classes pléthoriques des établissements scolaires publics gabonais. La mode des chargés de missions en nombre illimité est valable pour tous les cabinets ministériels. Il en est de même des chargés d’études. Plus d’un communiqué final du Conseil des ministres a rendu compte de l’exhortation du président de la République à la rupture avec les méthodes du régime déchu. Même si la répétition a des vertus pédagogiques, Brice Clotaire Oligui Nguema a tout intérêt à s’assurer qu’il ne prêche pas dans le désert. Le tribalisme est encore une réalité prégnante. Il se lit dans les nominations en Conseil des ministres. Jusque-là, les membres du gouvernement sont vautrés dans le mélange des genres. Ils continuent de confondre leurs cabinets avec les salles de réunion pour les activités dans leurs localités d’origine. Ils débarquent toujours au village à des fins personnelles avec une débauche de moyens de l’Etat. On gouverne aussi avec des symboles. Il manque l’électrochoc au sein du gouvernement et de la haute administration, alors même que les opérations de démolition de l’habitat spontané à Libreville, menées sans le minimum de communication, sont en train d’installer dans l’esprit des citoyens l’idée d’une duperie pendant la transition. Et le cafouillage au sujet d’un parti présidentiel à l’existence discutable n’est pas pour arranger les choses.

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