Qu’il est loin le vent du 12 Avril !  

Ce que l’on redoutait s’est, hélas, confirmé ! L’Union démocratique des bâtisseurs (UDB) et le Parti démocratique gabonais (PDG) n’ont pas en commun seulement l’adjectif « démocratique ». La formation politique du président de la République, portée sur les fonts baptismaux le 5 juillet dernier, et celle qui a dirigé le pays pendant cinquante-cinq ans regorgent de personnalités controversées, qui ont une grande part de responsabilité dans l’état de délabrement physique et moral du Gabon. Pire encore, l’UDB apparaît comme une usine de recyclage d’anciens hauts cadres du PDG, même si elle tente de donner le change en mettant au-devant de la scène quelques jeunes loups. C’est dans ce contexte de suspicion que le parti de Brice Clotaire Oligui Nguema va aux élections, avec pour principal objectif de s’offrir une majorité à l’Assemblée nationale.

Or, la suspicion entraîne généralement le désamour. Les Gabonais, donc les électeurs, se font désormais leur propre idée des vagues des démissions que le PDG a enregistrées ces derniers temps. Sans états d’âme, sans le moindre scrupule, des gens qui avaient juré fidélité à l’ancien parti au pouvoir, par la formule « J’y suis, j’y reste », en ont claqué la porte. Certains parfois avec fracas, en chargeant leur écurie d’hier de tous les péchés. Tout est désormais clair aux yeux des électeurs : les démissionnaires savaient qu’ils allaient rejoindre l’UDB, dont la naissance n’était encore qu’une rumeur qui a poussé nombre de voix à s’élever pour décourager la création d’un parti présidentiel, craignant justement que celui-ci se transforme en PDG bis. Le débat sur la faisabilité d’une telle entreprise a même vu s’affronter des juristes et l’arrêt de la Cour constitutionnelle est loin d’avoir ramené la sérénité.

Reste à savoir si l’UDB n’est pas un véritable panier à crabes, tant on y retrouve des cadres d’autres formations de l’ancienne majorité et de l’ancienne opposition. L’explication de cet attelage hétéroclite est simple : le parti présidentiel est synonyme d’argent qui coule à flot (le Trésor public étant d’ordinaire mis à contribution), de nominations et de promotions. C’est un tremplin, une rampe de lancement d’une carrière politique ou administrative ou encore politico-administrative. A la veille des élections, une autre circonstance relevant de l’amateurisme vient compliquer l’équation au camp présidentiel. Moins de deux mois après l’investiture du chef de l’Etat, le nouveau pouvoir s’est lancé dans une brutale opération de démolition des habitations se trouvant dans des zones déclarées d’utilité publique à Libreville et dans ses environs. Même si Oligui Nguema a essayé de passer le baume en accordant une audience au palais présidentiel à certains de ses compatriotes mis à la rue et en allant à la rencontre d’autres, rien ne garantit que la douleur va se dissiper avant le scrutin. Alors, il y a lieu de craindre que les citoyens ne prennent leur revanche dans les urnes.

Raison pour laquelle, dans les salons feutrés, des analystes estiment que le directoire de l’UDB devrait se garder de pécher par orgueil et de balayer d’un revers de la main l’idée d’une majorité présidentielle. Ni maintenant, ni pendant la campagne, les tenants du pouvoir n’ont intérêt à prendre les autres de haut, dont ils pourraient avoir besoin pour réaliser la majorité qu’ils cherchent à l’Assemblée nationale et, plus tard, au Sénat et dans les exécutifs locaux. Compter sur la débauche de moyens à l’effet de s’assurer une victoire est une vaine prétention. En son temps, le tout-puissant PDG caressait cette illusion, mais il devait rattraper ses résultats par la fraude, c’est-à-dire l’achat de conscience des scrutateurs et des membres des commissions électorales. Chose désormais difficile car en plus du fait que le dépouillement est public, la nouvelle loi électorale exige qu’un exemplaire du procès- verbal soit affiché devant chaque bureau de vote. De plus, après tout ce qu’il a dit et fait dire pour justifier le renversement de régime le 30 août 2023, le président-fondateur de l’UDB ne peut pas sombrer dans les mêmes travers, au risque d’accréditer la thèse d’un simple « ôte-toi de là que je m’y mette ». A l’occasion, notamment lors des Conseils des ministres, Brice Clotaire Oligui Nguema n’a de cesse d’appeler à la rupture et au renouveau. Il est toujours bon que l’exemple vienne de soi- même.

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